Catégorie : Folklore & Contes
Fer à Cheval
On raconte qu’il faut clouer un fer à cheval en le tenant de la main gauche tout en récitant le charme suivant.
« Père, Fils et Saint-Esprit,
Clouez le Diable à la Porte.
Trois fois, je te frapperai avec la Sainte Houlette.
Une fois pour Dieu, Une fois pour Wod[in] et une fois pour Lok. »
On dit aussi qu’il est permis aux seuls forgerons et maréchaux-ferrants de clouer le fer à cheval pointes vers le bas, tournées vers la terre, permettant à la magie ou à la chance de déborder. Et que si vous n’êtes pas de ceux-là, votre fer à cheval devra être accroché pointes vers le haut.
Récemment, je papotais avec une vieille voisine sur le pas de ma porte quand tout à coup, me montrant de sa canne le fer à cheval que nos voisins avaient accroché au-dessus de leur porte, elle s’exclama :
« Mais c’est pointes vers le haut qu’il faut accrocher le fer à cheval, sinon la chance, elle reste pas ! »
Chez nous aussi, dans le temps, un fer à cheval était accroché au-dessus de la porte de derrière. Il avait disparu depuis longtemps quand nous sommes arrivés mais sa trace était encore visible. Il avait été accroché pointes vers le bas. Je ne crois qu’il y ait eu de forgeron ni de maréchal-ferrant dans la famille.
En vérité, pointes tournées vers le haut ou vers le bas, les traditions divergent. Certaines mêmes y voient le C du Christ, et donc ce sont les pointes tournées vers la droite qu’il faudrait clouer le fer.
Personnellement, j’ai voulu installer celui qui trainait dans mes affaires « pointes vers le ciel ». J’y vois des cornes qui capteraient le pouvoir et surtout un symbole au Cornu.
Quoiqu’il en soit et quelque que soit la tradition, tout le monde est d’accord pour dire que le fer à cheval est un porte-bonheur. Il est protecteur et repousse les mauvais esprits. Le fer qu’il contient repousserait également les Fées.
On raconte que pour posséder réellement toutes ces qualités, il faudrait l’avoir trouvé soi-même. Exactement comme les pierres trouées !
Fées & digitales
Des fleurs de digitale tombées et mises à sécher pour divers sortilèges.
Les fées se passionnent pour la plupart des fleurs et, dit-on, ont pour mission de donner à chacune d’entre elles leur propre couleur à maturité, de guider les plantes grimpantes et les lianes, et d’enseigner aux jeunes plantes comment se mouvoir avec grâce et dignité.
Les fées ont un amour tout particulier pour les digitales. Lorsqu’une digitale fait la révérence, c’est pour marquer son obéissance envers ses petits maitres ou bien, se prépare-t-elle à accueillir un elfe qui souhaite se cacher dans ce lieu sûr que sont ses fleurs en forme de cloche.
En Angleterre, le nom pour la digitale est Foxglove. Fox pour Folk’s, c’est à dire dans ce contexte Petit Peuple, et non pas Fox dans le sens de renard. Il s’agit donc des Gants du Petit Peuple (gloves = gants). Ses autres noms vernaculaires sont Gants de fée, doigts de fée, dés à coudre, chapeaux, robes et jupons de fée. Au Pays de Galles, on l’appelle également Goblin’s Gloves. C’est à dire Gants de Gobelins.
Une chose est sûre, en ouvrant tout grand votre cœur et vos mirettes, vous pourriez bien voir danser les fées sous les digitales par une belle et chaude journée d’été :)
Digitalis purpurea alba. Dans notre jardin.
Digitalis purpurea alba. Une fleur poilue :p
Digitalis purpurea. Digitale pourpre. Celle-ci vient des bois.
Pain de fée, photo & récapitulatif des articles sur les pierres sorcières
Pain de fée. Oursin fossilisé. Micraster sp, turonien. Collection perso.
« Pain de fée », c’est ainsi qu’en Angleterre, et plus précisément dans le Sussex, on appelle ces oursins fossilisés. La légende veut que toute maison possédant une telle pierre ne manquera jamais de pain, à condition de la déposer près du foyer.
Un petit récapitulatif des articles sur les pierres sorcières :
- Pierres de pouvoir, Lune
- Crapaudine, une amulette ancienne, par Lune
- Les fossiles utilisés comme talismans, par Doreen Valiente
- Pierres trouées, par Doreen Valiente
- Fossiles et pierres sorcières, par Nigel Pennick
- Amulette de chance de mère nature, par Teresa Moorey
La déesse Brigid
Brigid par Sharon McLeod
Je me suis amusée à traduire un extrait d’un livre que j’adore : « A Dictionary of Fairies » écrit par la célèbre folkloriste britannique Katharine Mary Briggs. Il y est notamment question de la déesse Brigid. J’ai ajouté une note intéressante en fin d’article à propos des mots : forgeron, poésie et musique. Bonne lecture !
Brigit, ou Brid.
Extrait du livre « A Dictionary of Fairies » par Katharine Briggs. Traduction libre par Lune.
La déesse Irlandaise Brigid semble avoir été tellement aimée que l’Église Primitive ne put se résoudre à la séparer de son peuple et elle devint Sainte Brigitte d’Irlande.
Lady Grégory, dans Gods and Fighting Men, dit à son sujet (p. 2) :
Brigit… était une poétesse**, et les poètes l’adoraient, car son pouvoir était très grand et très noble. C’était une guérisseuse et elle pratiquait également l’art de la forge. C’est elle qui la première conçut le sifflet qui, à travers la nuit, permet de s’appeler les uns les autres. La moitié de son visage était horrible mais l’autre était particulièrement avenante. Son nom signifiait Breo-saighit, c’est-à-dire « flèche enflammée ».
Diverses sources sur les croyances en les fées* ont été citées dans la section « théories sur les origines des fées », et ce avec raison. Elles ont été appelées tour à tour « morts », ou « traditions des hommes primitifs » ou encore « esprits de la nature », mais il semble faire peu de doute qu’en Irlande, elles étaient, au moins pour certaines d’entre elles, les descendantes de ce Panthéon primitif.
* Note de Lune : j’ai traduit le terme « fairy » par fées, pourtant il ne s’agit pas exclusivement d’entités féminines. Peut-être serait-il plus juste de les appeler « peuple de féérie ».
** Note de Lune : Fait amusant, je suis tombée aujourd’hui sur cette note qui parle du double sens en « celtique » du mot qui veut dire forgeron. Arbois de Jubainville Marie-Henry d’. In: Comptes rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 51e année, N. 4, 1907. p. 204.
Je cite :
M. d’Arbois de Jubainville donne lecture d’une note sur le double sens en celtique du mot qui veut dire « forgeron ». La langue celtique primitive paraît avoir possédé deux mots, l’un masculin *kerdu-s, désignant le forgeron, l’autre féminin *kerda, désignant sa profession et le produit de son travail ; ces mots dérivent de la même racine que le latin cerdo, -onis « manouvrier » et que le grec xépSoç « gain ».
Les deux mots celtiques se retrouvent en irlandais et en gallois; *kerdus « forgeron » est devenu en irlandais ancien cert, ou mieux cerd, génitif cerdo, aujourd’hui céard, génitif céarda.
Dans la grande épopée qui raconte l’enlèvement du taureau divin et des vaches qui l’accompagnaient, on voit apparaître Culann, forgeron du roi d’Ulster. Il n’a d’autre fortune que son marteau, son enclume, ses tenailles et ses poings, mais il habite un château, dûn, et invite à dîner son roi qui accepte. Chose extraordinaire ! cerd, au sens de « forgeron », joint en irlandais celui de « poète », et comme conséquence, le féminin *kerda, en vieil irlandais cerd, génitif ceirde, a pris le sens de «poésie».
Un sens dérivé de celui-là est « musique » ; telle est la signification du gallois cerdd, parce que les poèmes, tous lyriques, se chantaient avec accompagnement de la harpe celtique, la crotta. Que diraient nos confrères les poètes de l’Académie française et les membres de la section de composition musicale à l’Académie des beaux-arts, s’il venait en idée à un statisticien de les classer dans la catégorie des forgerons et si la mode venait de désigner leurs œuvres par les mots qui servent à nommer les produits des usines métallurgiques ?
Un poète français a dit d’un des confrères :
De son rude marteau martelant le bon sens,
II fit de méchants vers douze fois douze cents 1.
Ce n’était pas aimable,
1. Boileau. Épigramme contre Chapelain.